Et si je dépolluais les sols agricoles ?
De plus en plus de personnes mangent des produits bio dans l’objectif de prendre soin de leur santé. Pour autant, même quand la terre qui a fait pousser nos fruits et légumes n’a subi aucun traitement à base de pesticides, elle reste souvent polluée. En Europe, plus de 25% des terres agricoles sont contaminées par des métaux lourds. Ils sont issus par exemple de la pollution atmosphérique ou de l’utilisation passée de certains traitements des sols, et portent les jolis noms de : plomb, arsenic, zing, manganèse… Nous sommes exposés à ces pollutions invisibles sans en avoir conscience.
C’est Ludovic Vincent, ingénieur agronome, qui m’explique cela. Pour répondre à cet enjeu de santé publique, il a co-fondé Biomede, une entreprise dont la mission est d’utiliser les plantes pour extraire les métaux lourds des sols.
Redonner à la nature un rôle, c’est ce que fait Ludovic, et il nous raconte comment…
CONCEPT ET CREATION
Qu’est ce qui t’a amené à créer Biomede ?
Je suis ingénieur agronome et j’ai co-fondé Biomede avec Patricia Gifu, docteur en cancérologie et ingénieur en biotechnologie. Nous sommes partis du constat qu’1/3 des cancers sont d’origine environnementale et qu’il y a beaucoup de sols contaminés par des métaux lourds qui peuvent induire des problèmes de santé. En créant Biomede, en 2018, notre enjeu était de pouvoir limiter l’exposition des personnes à ces polluants dans les sols.
Et en quoi consiste votre activité aujourd’hui ?
Il y a 2 parties par rapport à la vocation à impact de l’entreprise :
Faire connaître la pollution des sols agricoles au grand public et aux agriculteurs eux-mêmes. Pour cela on utilise un appareil spécifique qui permet d’avoir des mesures instantanées dans les sols sur lesquels on va intervenir.
Et, la partie traitement, c’est-à-dire retrait des métaux lourds des sols. On utilise des plantes qu’on appelle hyperaccumulatrices, qui vont naturellement capter avec leurs racines certains éléments dans les sols - dont les métaux lourds - et les accumuler dans leur partie aérienne. On retire ensuite ces plantes pour enlever les métaux lourds des sols.
L’appareil qui permet d’obtenir ces mesures, c’est vous qui l’avez mis au point ?
C’est une technologie qui était auparavant utilisée par dans l’aéronautique. On a détourné son utilisation pour l’agriculture et on a optimisé l’appareil pour la connaissance des métaux lourds.
CLIENTS
Qui sont tes clients ?
On travaille avec des associations, des agriculteurs et des particuliers. Notre objectif c’est de faire quelque chose qui soit le plus abordable possible.
Nos premiers clients sont les agriculteurs, qui sont orientés dans une démarche de qualité et qui veulent aller plus loin que ce qui leur est demandé jusqu’à présent. Ils font appel à nous pour savoir quel est l’état des lieux de leur sol et s’il y a des choses sur lesquelles on peut intervenir. Ceux-sont eux qui en grande partie financent ce modèle.
Ensuite on a des associations. En proximité de ville et en ville, les sols sont particulièrement pollués. Quand on rapproche l’agriculture des centres urbains pour fonctionner le plus possible en circuit court, on se heurte en effet à cette problématique. Des associations implantent des potagers en ville par exemple et la pollution des sols n’est pas la première chose à laquelle elles vont penser. On facilite donc cette connaissance auprès d’elles et ensuite on les accompagne sur des solutions moins problématiques pour la santé comme la culture en bac par exemple.
Concernant les agriculteurs, tu dis qu’ils sont déjà orientés dans une démarche de qualité, ça veut dire qu’ils sont engagés dans le bio par exemple ?
Oui effectivement, on a commencé à travailler avec des agriculteurs et viticulteurs qui sont déjà très engagés dans les pratiques éco responsables. On travaille aussi avec des agriculteurs traditionnels. Ensuite beaucoup d’entre eux n’ont pas le label mais sont dans des démarches très vertueuses en termes de qualité.
Et derrière, comment ces agriculteurs communiquent sur les démarches de ton entreprise ?
C’est un peu le paradoxe, tous ne communiquent pas là-dessus. En revanche, comme ils sont positionnés comme des références en termes de qualité, ils vont le plus loin possible dans la démarche, et notre but, c’est qu’ils puissent entraîner dans leur sillage d’autres agriculteurs, qui auraient envie d’atteindre ce même niveau de qualité.
Donc nous en tant que consommateur on n’a pas la possibilité de savoir si nos produits font appel à ce type de démarche ?
Aujourd’hui non. On essaie de faire en sorte que notre démarche puisse s’intégrer à des labels existants, dans lesquels les clients peuvent avoir vraiment confiance. Ce qu’on veut c’est démocratiser la connaissance, donc si on peut se greffer à un label, on essaiera de le faire. C’est sûr que c’est important que les consommateurs puissent aussi choisir leurs produits par rapport à ces aspects-là.
Combien de clients tu as à ce jour ?
On a une cinquantaine de clients : ¾ sont des agriculteurs et les autres sont des associations qui font appel à nous sur des problématiques d’agricultures urbaines.
Ils sont principalement en France ?
En France et en Europe.
FINANCEMENT
Aujourd’hui je comprends que l’entreprise est principalement financée par vos clients, les agriculteurs, est-ce que tu as d’autres sources de financement ?
On a aussi fait une levée de fonds en amorçage avec des propriétaires de vignobles et auprès de la Fondation Clean Land qui œuvre pour la qualité des sols.
ENGAGEMENTS
Est-ce qu’il y a d’autres engagements que tu aimerais me communiquer ?
L’enjeu à la fin c’est de pouvoir rendre le diagnostic et le traitement accessible à tous.
Ensuite, il y a de moins en moins d’agriculteurs. Il y a des pressions foncières fortes et c’est un monde assez compliqué. Notre objectif est aussi de faire des implantations de nouveaux agriculteurs sur des nouvelles parcelles. Etre solidaire avec les agriculteurs qui commencent dans le métier, en leur mettant à disposition des solutions qui soient le plus abordables possible nous tient vraiment à cœur.
EQUIPE
Vous êtes combien chez Biomede actuellement et comment vous vous divisez les tâches ?
On est 9. On a une personne qui pilote les aspects scientifiques, une directrice financière, 2 personnes en marketing et des commerciaux. Mon associé est sur la partie R&D, notamment par rapport à l’appareil aux rayons X qu’on utilise. Et, je suis sur la partie agricole pour répondre aux questions techniques des agriculteurs et adapter nos solutions à leurs besoins.
CULTURE ET MANAGEMENT
Comment fonctionnez- vous tous ensemble ? Est-ce qu’il y a une culture d’entreprise ?
Je ne sais pas si on a une culture d’entreprise, globalement il y a une bonne ambiance. Je ne peux pas parler pour tout le monde mais je pense que tous les gens qui sont chez Biomede se sentent concernés par ces enjeux autour de la planète et de la santé et veulent essayer de faire quelque chose pour que le monde soit meilleur, et ça c’est quelque chose qui fédère.
Est-ce qu’il y a une personnalité Biomede ?
Non au contraire. Le pluralisme parfois c’est compliqué mais je pense que c’est une richesse pour une société comme pour un monde. C’est bien qu’il n’y ait pas « une personnalité » Biomede. Chacun perçoit les choses différemment, à une sensibilité différente et c’est justement ça qui fait qu’on avance dans une direction intéressante.
RECRUTEMENT
Est-ce que tu as des recrutements de prévus cette fin d’année ou l’année prochaine ?
On a beaucoup recruté à la fin du premier confinement.
On va encore recruter sur des aspects R&D car on a obtenu un financement de l’ADEME pour travailler sur de nouvelles variétés de plantes. On va aussi prochainement recruter des commerciaux et des profils plus techniques pour travailler sur les solutions qu’on propose.
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