Et si je livrais des produits ultra-frais provenant de fermes durables ?
Inspirés par le modèle californien de livraison de produits locaux, Paul et ses associés ont créé Alancienne, à Paris, il y a 4 ans. Ces 4 passionnés ont beaucoup d’ambition : leur action va au delà de la livraison de produits locaux et durables puisqu’ils accompagnent les producteurs en amont, sur la mise en place d’une agriculture plus vertueuse et écologique et travaillent aussi sur la création d’une ferme agroécologique.
Alancienne, c’est d’abord l’histoire d’un passionné de bonne cuisine qui livrait les produits locaux de sa région à ses amis parisiens.
Je laisse Paul vous raconter son histoire…
CRÉATION ET CONCEPT
Est-ce que tu peux me raconter l’histoire d’Alancienne ? Pourquoi as-tu voulu créer cette entreprise ?
Je suis normand et passionné de cuisine depuis mon plus jeune âge. J’ai vite compris que pour bien cuisiner, il fallait des bons produits et je suis donc allé à la recherche des petits producteurs normands. Puis, quand je suis arrivé à l’école à Paris, ça a été compliqué… je mangeais très mal. Du coup, quand je rentrais le week-end en Normandie, je ramenais mes paniers de fruits et légumes. Mes collègues dans la résidence où je logeais m’ont demandé de leur en amener aussi et c’est ce que j’ai fait. C’est à ce moment-là que j’ai commencé à avoir en tête cette idée de livrer des produits en direct des producteurs, mais je n’étais pas encore prêt à me lancer dans l’entrepreneuriat. Ensuite, je suis parti à l’université de Berkeley en Californie pour finir mes études. Aux Etats-Unis tu es vu comme un héros quand tu es entrepreneur, et, là-bas, j’ai appris à ne pas avoir peur de l’échec, à prendre l’échec comme une réussite. J’y ai rencontré deux de mes associés et on s’est rendu compte qu’il y avait en Californie de nombreux acteurs qui livraient les produits des petits producteurs locaux, comme Good Eggs par exemple. En 2016, on est rentrés en France et on s’est lancés.
Peux-tu m’expliquer le concept ?
On livre à domicile des produits ultra-frais et agroécologiques en direct des producteurs locaux (moins de 200km) et durables.
L’agroécologie, c’est l’idée de réduire les intrants des fermes : réduire les produits phytosanitaires, la dépendance aux énergies fossiles et améliorer la gestion de l’eau. En réalité, on a des producteurs qui sont tous en bio ou en conversion vers le bio et on les accompagne vers ce mouvement. On audit les fermes et après validation, on met leurs produits sur le site.
Les produits sont cueillis le matin et livrer le soir. Les gens vont sur le site internet et choisissent ce qu’ils veulent quand ils veulent jusqu’à la veille de la livraison. Ils n’ont pas besoin d’abonnement pour commander.
Les gens peuvent commander jusqu’à 22h la veille de la livraison. A 22h, on envoie la commande aux producteurs. Le lendemain matin, les producteurs cueillent les produits, on vient les chercher en fin de matinée, on les emmène dans notre local à Levallois pour la région parisienne et à Villeurbanne pour Lyon. On gère nous-même tout l’empaquetage dans des packagings recyclés et recyclables. La seule chose qu’on n’a pas en recyclable c’est la poche pour les produits frais et on met donc celle-ci en consigne. Puis, on livre les gens le soir sur des créneaux de 2h, en scooter électrique.
Comment vous faites pour auditer les fermes ? Vous le faites vous-même ?
Ce qu’on a mis en place pour piloter ça, c’est la comptabilité multi-capitaux. L’idée, c’est de comptabiliser le capital économique, le capital social et environnemental à l’échelle d’une entreprise. Toutes les actions qu’on engrange à l’échelle de la ferme ou de l’entreprise Alancienne sont réfléchies de sorte qu’on prenne en compte l’impact social et environnemental, pour essayer de voir les choses de manière globale. C’est difficile mais en pensant de cette manière-là, on s’approche de la direction dans laquelle il faut aller.
On a aussi monté en Essonne : la Ferme de L’Envol et on essaie d’appliquer cette comptabilité multi-capitaux à cette ferme, en même temps qu’on la construit. Comme on s’y connait très bien aujourd’hui sur toutes les problématiques agricoles, on est très au fait de ce qui va ou ne vas pas dans le bon sens.
CLIENTS
Je comprends que vos clients sont principalement des particuliers. Est-ce que vous avez d’autres clients ?
On travaille un peu avec des restaurateurs mais notre service n’est pas forcément adapté pour l’instant donc on se concentre sur les particuliers pour le moment.
FINANCEMENT
Est-ce que vous avez eu des aides financières pour vous lancer ?
On a eu beaucoup de chance. On a lancé le projet de manière très « Lean » : on est allés voir un producteur, on a mis ses produits sur un classeur Excel et on a envoyé ça à nos potes. On a fait tout de suite du chiffre d’affaire et ça nous a permis de faire un site et d’avoir nos premiers utilisateurs. On a eu la chance d’avancer jusqu’ici sans aide et aujourd’hui on a envie de booster l’activité et d’avoir un impact à plus grande échelle, donc on va aller chercher des financements. Au vu de nos valeurs, on ne peut pas aller chercher des financements classiques donc on regarde du côté des investisseurs à impact.
ENGAGEMENTS
Si tu devais me résumer tes engagements actuels et futurs, que dirais-tu ?
- Les fermes avec qui nous travaillons restaurent la biodiversité.
- On améliore la qualité des sols.
- On est en circuit ultra-court.
- On améliore l’économie locale.
- On rémunère les agriculteurs beaucoup mieux, ce qui leur permet aussi d’améliorer leurs pratiques : on rentre donc dans un cercle vertueux global.
- On diminue le gaspillage alimentaire car on ne commande que ce qui est commandé par les gens : les producteurs ne cueillent que ce qui a été commandé. On estime - le chiffre réel du gaspillage de la grande distribution restant très secret - qu’on a économisé par rapport à un circuit classique, 9 tonnes de gaspillage depuis le 1er janvier 2020.
- Il y aussi toute la partie sociale, qui est de donner accès au plus grand nombre aux produits de l’agroécologique.
- Enfin, on va mettre en place de l’insertion professionnelle sur notre métier d'empaqueteur : on va travailler avec un ESAT.
EQUIPE
Vous êtes combien et qui fait quoi ?
On est 4 associés : Alexis s’occupe de toute la partie développement, c’est le Tech. Livio s’occupe du client à partir du moment où il arrive sur le site, il a fait tout le design du site. Augustin, arrivé un peu plus tard, avait travaillé chez Deloitte et il nous a rejoint pour bosser sur la stratégie, l’opérationnel et la logistique. Et de mon côté, je gère l’administratif, les relations presses, partenaires extérieurs et surtout je gère toute la sélection des producteurs à Paris et Lyon.
On a en plus un salarié qui s’occupe de l'acquisition client et quelqu’un en com’ qui s’occupe de Lyon. On a des personnes en logistique, d’autres qui font le tour des producteurs, des empaqueteurs, des livreurs… Au total, en équivalent temps plein, on est aujourd’hui une 30aine.
CULTURE
Qu’est ce qui représente votre culture d’entreprise ?
- C’est difficile d’en parler, il faut surtout la vivre mais toutes ces valeurs transpirent dans tout ce qu’on fait au jour le jour.
- On essaie d’inclure tout le monde dans les process de décisions importantes. A côté, on est partenaire fondateur de La Ferme de l’Envol. Afin de gérer cette ferme avec tous les autres partenaires : des restaurateurs, agriculteurs, Fermes d’Avenir, la Communauté d’Agglomération… on a créé une société coopérative d’intérêt collectif. On décide tous ensemble des décisions et ça nous inspire beaucoup pour l’intégrer dans notre entreprise.
- Ce qui est intéressant aussi c’est qu’on est dans un monde de passionnés très épicuriens, qui aiment les bonnes bouffes, les apéros… et ça fait aussi partie de notre culture. A part deux périodes début janvier et début septembre où il y a beaucoup de boulot, chacun peut prendre des vacances quand il veut.
- On responsabilise beaucoup. Chacun peut travailler d’où il veut, quand il veut. On a remarqué que quelqu’un qui travaille de loin ou qui rallonge son week-end, est encore plus en forme quand il revient. Sortir la tête du guidon est important.
- Et, à partir du moment où quelqu’un ne fait plus son job, on essaie de tous se remettre en question, de se mettre autour de la table pour comprendre ce qui ne va pas.
RECRUTEMENT
Est-ce que vous avez de nouveaux recrutements de prévus ?
Pour l’instant non. Lorsqu’on lèvera des fonds, en début d’année prochaine on recrutera de nouvelles personnes.
Qu’est ce qui te donne envie de recruter quelqu’un ?
- L’envie
- La passion
- Le dynamisme
- La capacité à monter en compétences
- On ne cherche pas d’expériences, on cherche du potentiel
- La capacité à rebondir, à avancer, à être indépendant, autonome.
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